Depuis l’instauration des autorisations d’urbanisme qui ont vu le jour durant la seconde guerre mondiale, la France compte chaque année des centaines de constructions illégales sur son territoire.
Ainsi, la vente d’un bien construit en tout ou partie de manière illégale est une situation à laquelle de nombreux acquéreurs ont déjà été confrontés.
Toutefois, aucune disposition n’interdit la vente d’un bien construit illégalement, de sorte qu’une telle vente est en principe possible. Néanmoins, cela ne sera pas pour autant sans conséquences pour l’acquéreur.
Afin d’endiguer cette situation, le législateur s’empare de la question des constructions illégales en mettant en place un panel de sanctions à l’encontre des contrevenants. Aussi, la vente du bien construit irrégulièrement ne fait pas obstacle à la mise en œuvre des sanctions pénales, civiles et administratives prévues par le législateur.
L’édification d’une construction non autorisée ou en méconnaissance de l’autorisation d’urbanisme délivrée constitue un délit pénal, susceptible de poursuites devant le Tribunal correctionnel.
En effet, l’article L. 480-4 du Code de l’urbanisme dispose qu’en cas de construction non autorisée, le contrevenant peut être punis d’une amende comprise entre 1.200€ et 6.000€ par mètre carré, dans un délai de six ans suivant l’achèvement des travaux illégaux. En cas de récidive, une peine d’emprisonnement de 6 mois peut également être prononcée.
En plus des sanctions pénales principales, peuvent également être prononcées des sanctions pénales complémentaires. Ces sanctions sont également appelées mesures de restitutions car elles permettent la mise en conformité des constructions et peuvent aller jusqu’à la démolition du bien illégalement édifié. Ces mesures de restitutions ne constituent pas des sanctions pénales stricto sensu. Elles constituent principalement des mesures réelles destinées à faire disparaitre la situation illicite née de l’infraction pénale.
Le principe de personnalité des peines empêche de poursuivre pénalement l’acquéreur de la construction illégale dès lors qu’il n’a pas personnellement commis l’infraction, sauf à ce qu’il soit personnellement mis en cause devant la juridiction répressive à titre de complicité (Cour de cassation, 3 mars 1993, n° 92-85010, publié au bulletin). Toutefois, l’acquéreur se trouve exposé au risque d’une condamnation pénale du vendeur. En effet, les mesures de restitution ont un caractère réel et suivent le bien en quelques mains qu’il passe. Ainsi, selon une jurisprudence constante, la vente du bien ne fait obstacle ni au prononcé de mesures de restitution, ni à leur exécution (Cour de cassation, 15 mars 1995, n° 94-80707, publié au bulletin).
Ainsi, l’acquéreur peut se voir contraint de mettre le bien en conformité avec le permis de construire délivré en cas de construction non conforme au permis de construire. Surtout, il peut être contraint de poursuivre la démolition de la construction construite illégalement en cas de construction édifiée en l’absence d’autorisation d’urbanisme.
Le tiers lésé par la construction non-conforme peut mettre en jeu la responsabilité civile du bénéficiaire de l’autorisation de construire dépourvu d’autorisation.
Le défaut de permis ou sa méconnaissance ne suffissent pas en soit à fonder une action en responsabilité du tiers lésé. En effet, le requérant devra pour cela établir la réalité d’un trouble anormal ou la violation d’une servitude d’urbanisme lui portant un préjudice direct et certain.
En vertu du droit commun de la responsabilité civile, le délai de prescription est de cinq ans suivant l’achèvement des travaux illégaux. Passé de délai quinquennal, il ne sera plus possible à un tiers de remettre en cause la construction illégale. (Article 2224 du Code civil)
En ce qui concerne l’action publique, l’article L 480-14 du Code de l’urbanisme prévoit que la collectivité dispose d’une action devant le tribunal judiciaire afin de voir ordonner la démolition ou la mise en conformité du bien construit sans l’autorisation d’urbanisme requise ou en méconnaissance de cette autorisation.
Cette action est soumise à une prescription décennale qui permet de ne plus demander la démolition ou la mise en conformité au-delà de ce délai de dix ans. En pratique, l’acquéreur risque toutefois d’être confronté à des difficultés probatoires concernant la justification de la durée écoulée depuis l’achèvement de la construction illégale.
L’acquéreur doit donc veuillez à disposer d’éléments suffisants permettant de justifier que la construction date d’il y a plus de dix ans et que l’action de la collectivité est prescrite. Or, une simple facture de matériau ou d’un artisan ne suffit pas à établir cette preuve. Dans certaines circonstances, si l’acquéreur n’est pas en mesure de déterminer la date exacte d’achèvement des travaux, le délai de dix ans continue à courir et la collectivité dispose toujours de son droit d’action.
Ainsi, passé un délai de dix ans suivant sa construction, la personne qui a acquis un bien construit illégalement ne pourra pas se voir demander la démolition ou la mise en conformité du bien.
Lorsqu’un bien a été construit illégalement, il peut connaître des restrictions aux droits de construire.
En effet, si le bien construit illégalement aurait dû faire l’objet d’une demande de permis de construire, au bout de dix ans, même s’il n’est pas possible de demander la destruction du bien, la collectivité pourra toujours refuser au propriétaire toutes autorisation d’urbanisme sur le terrain (extension, surélévation, modification de façades, etc.) que cela relève d’un permis de construire ou d’une déclaration préalable)
Aussi, si le bien construit illégalement aurait dû faire l’objet d’une déclaration préalable ou du non-respect des prescription d’un permis de construire ou d’une déclaration préalable, passé un délai de dix ans, la collectivité ne pourra plus refuser l’octroi de l’autorisation d’urbanisme sur ce fondement.
Les professionnels qui interviennent dans ce type de vente doivent avertir l’acquéreur de manière suffisante sur cette conséquence au titre de l’obligation d’information et de conseil
En effet, récemment un notaire à écopé d’une amende de 100 000 euros pour ne pas avoir informé l’acquéreur de cette particularité et lui avoir fait perdre une chance de négocier le prix de cession.
Sources :
Ordonnance n° 2013-638 du 18 juillet 2013 relative au contentieux de l’urbanisme.
Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014
Loi Elan n° 2018-1021 du 23 novembre 2018
Loi Engagement et proximité n° 2019-1461 du 27 décembre 2019
Article 2224 du Code civil
Article 1240 du Code civil
Article L. 480-4 et L.480-14 du Code de l’urbanisme
Cour de cassation, 3 mars 1993, n° 92-85010, publié au bulletin
Cour de cassation, 15 mars 1995, n° 94-80707, publié au bulletin
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